La Cour des comptes vient de rendre public un document dressant
la liste des obstacles à la politique de financement du gouvernement en
matière de très haut débit (notamment le déploiement de la fibre optique
sur l'ensemble du territoire). L'autorité relève plusieurs problèmes
majeurs et constate que le « rythme de déploiement est moins rapide que prévu » pour les opérateurs privés.
En 2010 était lancé le Programme national très haut débit afin de couvrir 100% des foyers du territoire national en très haut débit
à l'horizon 2025. Pour ce faire, une enveloppe de 2 milliards d'euros
était dégagée dans le cadre du Fonds national pour la société numérique.
Un investissement public élevé « dans un contexte budgétaire très contraint » qui justifie alors l'attention de la Cour des comptes, estime l'institution.
La Cour des comptes a donc publié un référé
en mettant le doigt sur les obstacles à la mise en œuvre de cette
politique. En premier lieu, elle constate que même dans les zones où la
population est très dense certaines poches dans lesquelles les « opérateurs ne sont pas intervenus en raison d'une densité de population plus faible » se sont constituées. L'autorité explique en partie ces disparités par le fait que dans ces mêmes zones, « la
bonne qualité des offres haut débit existantes (ADSL, réseau cuivre),
dont les prix sont parmi les plus bas au monde, constitue un frein aux
souscriptions d'abonnement très haut débit ».
En dehors de ces zones denses, le document précise que les initiatives
engagées par Orange et SFR en matière de déploiement sans aucune
subvention publique (zone AMII, pour appel à manifestations d'intentions
d'investissement) restent à ce jour « très limitées ». Toujours est-il que la Cour des comptes attribue cet « attentisme des opérateurs » à leur situation financière qualifiée de « fragile ».
Autre argument de poids, l'institution ajoute qu'en matière de
déploiement de réseaux en fibre optique jusqu'à l'abonné (FttH), le
retour sur investissement sera long (plusieurs dizaines d'années) alors
que l'horizon d'amortissement des opérateurs est généralement plus
court. En conséquence, les opérateurs privés (à l'exception d'Orange) « n'ont donc pas l'intérêt ou les moyens d'investir massivement dans la fibre ».
Second point, l'extinction de la boucle locale en cuivre, c'est-à-dire
le réseau allant jusqu'au domicile de l'abonné. La Cour estime que le
prix du basculement total d'un réseau cuivre vers un réseau en fibre,
ainsi que les difficultés inhérentes à de tels travaux, n'ont pas été
réellement identifiés. A ce titre, des tests sont menés dans la ville de
Palaiseau et doivent être terminés en 2014, date à laquelle il sera
plus aisé de connaître les éventuels ralentissements consécutifs à cette
initiative ainsi que leurs coûts.
Enfin, les réseaux dits d'initiative publics (RIP) sont des zones dans
lesquelles les opérateurs n'ont pas manifesté leur intention de
déployer. Dans ce cas, les collectivités territoriales et l'Etat peut
décider de mettre la main à la poche. Dans cette dernière configuration,
les coûts risquent en effet d'exploser et la Cour des comptes reprend
l'argumentaire de la DATAR (délégation interministérielle à
l'aménagement du territoire et l'attractivité régionale) sur le sujet
évaluant à 22 milliards d'euros le coût de la couverture en fibre
optique des « 40 derniers pourcents de foyers français, dont 7 milliards au titre de la couverture des 5 derniers pourcents de foyers ». Toutefois, ces RIP souffrent de « risques
techniques et financiers non négligeables en raison d'une
multiplication des projets indépendants de RIP de petite taille », juge la Cour.
En conséquence, l'institution considère que la priorité ne doit pas
uniquement être accordée au déploiement de la fibre optique et
recommande l'utilisation de technologies alternatives comme la montée en
débit, les réseaux hertziens terrestres ou le satellite. Elle invite
également le gouvernent à redéfinir une stratégie de pilotage national
sur la question.
De son côté, le gouvernement a, par la voix du Premier ministre, répondu
au document produit par la Cour des comptes en indiquant que son
objectif était d'apporter « le très haut débit à tous les Français
d'ici 2022 en mobilisant l'ensemble des possibilités technologiques
existantes, comme le préconise la Cour, et notamment les technologies
les plus rapides et les moins coûteuses ». La fibre optique n'est et ne sera donc pas la seule technologie mise en avant.
Par exemple, dans des zones où une connexion filaire est impossible (ou à
de coûts déraisonnables) comme les zones de montagne, les solutions
satellitaires seront promues. Enfin, Jean-Marc Ayrault précise
qu'actuellement, la mission très haut débit est chargée de mettre en
place la stratégie de déploiement des réseaux. Un observatoire des
déploiements des réseaux sera d'ailleurs publié à la fin de l'année afin
de dresser un état des lieux de l'activité de chaque opérateur en la
matière. source
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